Conclusion générale de ma thèse
« Le capital investissement en droit tunisien et
droit comparé »
Le capital investissement, en tant que mode de financement alternatif à l’endettement, souffre de plusieurs
handicapes que les professionnels appellent des dysfonctionnements, dus à des
anomalies et des lacunes juridiques. Bien que, depuis quelques années les
autorités tunisiennes ont accepté de promulguer de nouveaux textes, en
l’occurrence les deux décrets – lois n° 99 et n° 100 de l’année 2011, ces
dysfonctionnement persistent, notamment, au niveau des
structures et véhicules qui le gèrent. Ils persistent, particulièrement, au
niveau de la segmentation qu’elle soit géographique ou sectorielle.
D’ailleurs, l’appellation de ce mode alternatif de financement par les textes
de droit tunisien « Capital Développement »
(le texte référence en arabe cite « tanmiya », voir l’introduction) est en soi une défiguration de la
substance même de ce mécanisme, au point où plusieurs professionnels du secteur
en Tunisie parlent d’un capital risque sans risque ; alors que ce mode de
financement est caractérisé par la prise de risque ou carrément, comme il a été
connu depuis le début, par l’aventure.
A l’évidence, il n’y a pas un large choix de solutions,
par contre, il n’en y a qu’un seul. C’est celui d’accepter la notion et de l’adopter
avec tous ses caractéristiques juridiques ; pour ensuite la lancer dans le contexte économico – social. Le
capital investissement devrait réussir, ainsi, à fonctionner convenablement
pour réaliser les meilleurs résultats.
Pour pallier à tous les problèmes du capital
investissement, le législateur devrait, tout d’abord, prendre en considération
tous ces dysfonctionnements. Il devrait commencer par mentionner, dans le
nouveau texte préconisé, les formes juridiques et les catégories des véhicules
de ce mode de financement. Il devrait, aussi, mentionner des capitaux
investisseurs personnes physiques, connus sous l’appellation
Business Angels. Toutes ces désignations se feront par classification chapitre
par chapitre. Le premier sera consacré aux règles communes à tous les véhicules
et les investisseurs personnes physique. Le deuxième chapitre sera consacré aux
règles spéciales des SICAR. Le troisième chapitre sera consacré aux règles
spéciales des FCPR. Le quatrième chapitre sera consacré aux règles spéciales
pour la reconnaissance des « Business Angels » et une organisation
souple de leur intervention. Un chapitre sera consacré aux étapes
d’investissement et de désinvestissement en indiquant les délais nécessaires à
chacune d’elles. Un dernier chapitre sera consacré à la fiscalité telle que
disposée par le décret-loi n°2011-100 du 21/10/2011. Chaque chapitre sera divisé
en section expliquant les détails de chaque élément.
Pour que le projet réussisse, il nous semble que le
prochain texte doit avoir un objectif clair qui est celui de rapprocher, le
plus, le capital investissement des partenaires. Pour atteindre cet objectif, le
droit doit être un allié utile à associer à la concrétisation
du projet. Cette alliance se fera dès les phases en amont, et elle évitera
qu’il soit pressenti comme une contrainte à devoir prendre en compte ; ou
à devoir éviter que ce soit en amont, en cours d’exécution du projet ou en
aval.
Pour cette raison, le droit que nous préconisons, pour
le capital investissement, devrait beaucoup s’imprégner de son homologue
anglo saxon dans la largesse du champ accordé aux partenaires. Il facilitera d’établir
les conventions et les processus de travail selon les besoins de l’entreprise. Notamment,
il doit s’imprégner de la forme juridique de la Société par Actions Simplifiée du droit
français ; à cause de sa souplesse qui permet aux partenaires de faire le
montage de projet, selon leurs ambitions pour réussir à réaliser les plus –
values escomptées. En d’autres termes, le droit ne
devrait pas être contraignant en imposant la mise en œuvre de mécanismes de direction
et contrôle qui limitent le champ aux promoteurs et aux investisseurs en
capitaux. Mais, il devrait s’effacer suffisamment afin de permettre
l’apparition de dispositifs ad hoc plus souples. Ces dispositifs répondront, au mieux, aux revendications des
professionnels et elles feront du droit un ami, un soutien et un outil efficace pour
ce mode de financement peu connu, voire même rejeté par les
investisseurs tunisiens.
En plus, les textes doivent avoir la possibilité
d’évoluer aussi vite que la pratique des investissements par ce mode de
financement. Ainsi, ils doivent être en perpétuel modification et évolution
afin d’être à jour des nouveautés technologiques et des innovations qui se
développent à un rythme rapide. Pour assurer la continuité des modifications,
il faut mettre en place une commission professionnelle chargée de suivre toutes
les nouveautés en relation avec le capital investissement. Elle proposera, chaque
fois que c’est nécessaire, des projets
de loi pour modifier les textes en vigueur.
Dans ce cadre, nous pouvons avancer le recours aux
plates-formes électroniques de plus en plus nombreuses, pour raccourcir,
faciliter et accélérer le contacte entre les investisseurs et les promoteurs pour
la réalisation des projets. A l’instar du nouveau monde de financement
alternatif, en l’occurrence le crowdfunding, le législateur et les
professionnels devraient s’y inspirer pour moderniser les interventions du
capital investissement, par le biais des procédures immatérielles et abandonner
les procédures de la paperasse bureaucratiques. La dématérialisation permettra de
rapprocher davantage des entrepreneurs ; et elle facilitera leur tâche de
lancement des projets.
En plus, parmi les solutions que le texte devrait préconiser,
il y a la fédération et l’unification des différents textes touchant au capital investissement. Il s’agit des textes de l’essaimage, l’incubation et de l’amorçage. Il s’agit, aussi, des lois relatives aux PME pour aboutir aux
différentes phases d’investissement désinvestissement de ce mode de financement alternatif. Il y a, également, la question de
la fiscalité qu’il faut, au moins, préserver avec tous ses
avantages ; afin de continuer à inciter
les investisseurs à prendre participation aux fonds des entreprises. Mais, il est indispensable d’instaurer
un système de contrôle et de suivi ex post aux activités des véhicules et des
structures. Un système qui doit être monté par les membres mêmes de la
communauté des capitaux investisseurs représentée par leur association. Cette dernière doit avoir une
certaine autorité vis-à-vis de tous les véhicules et de les représenter tous
sans exception. Elle aura pour tâche principale d’essayer d’unifier et
d’harmoniser les procédures de financement actuellement diverses, longues et
complexes, autant que possible.
Dans un contexte de recherche d’investisseurs locaux
et étrangers, le législateur tunisien doit commencer par faire évoluer les
textes de son tissu législatif touchant le capital investissement. Les actuels
textes semblent dépassés par les temps qui courent caractérisés par les
multitudes inventions incrémentales dans tous les domaines ;
particulièrement, par les innovations
dans les domaines des technologies de l’informatiques et de la communication. Ces
inventions, fruits de la Recherche et Développement, rendent les textes législatifs
décourageants pour les investisseurs, voire même, elles les rendent obsolètes.
En effet, dans ce contexte inventif et innovatif, nous
sommes supposés revoir nos textes touchant le secteur du capital investissement, pour offrir aux investisseurs ainsi qu'aux
promoteurs un nouveau cadre juridique plus souple. Il leur offrira plus de
liberté à établir leurs propres contrats pour la création et la gestion de leurs projets dans tous les secteurs,
mais particulièrement dans le secteur des TIC.
Le nouveau cadre juridique, que nous préconisons, doit être novateur
capable de permettre aux chercheurs de créer leurs entreprises afin de
valoriser leurs travaux de recherches antérieurs. Il offrira la possibilité
d’une prise en charge temporaire des salaires et la possibilité de retour du
promoteur dans le laboratoire d’origine en cas d’échec. Ce dernier mécanisme
est un encouragement et une incitation aux promoteurs qui craignent, justement,
d’échouer. Il leurs permettra, certainement, de se rassurer un tant soit peu.
Un élément très important dans l’application des
nouveaux textes devrait s’imposer. Il s’agit du règlement des litiges. En
effet, des tribunaux plus autonomes devraient être capables de trancher les
litiges plus rapidement, en toute indépendance ; avec une meilleure
gestion des relations contractuelles. Le cadre législatif d’arbitrage doit être
plus évolué et plus performant. Ces modes de règlements de différends rassureront
les investisseurs sur le sort de leurs fonds, et leur permettront de gagner du
temps et de l’argent.
Force est de constater, dans un contexte où le
renforcement des normes prudentielles pour l’endettement bancaire est flagrant, que l’accroissement de la part du
financement des entreprises par le capital investissement devient impératif et doit, donc, augmenter. Ces augmentations de prise de
participation en fonds propres de projets risqués, se réalisent quand les
investisseurs se voient offrir en amont un cadre légal favorable sur tous les
niveaux. Ce cadre doit être protecteur par les mécanismes de garantie et de soutien et stabilisé par le climat sain
et serein du pays, dans lequel s’inscriront leurs investissements. Avec les efforts nécessaires, nous arriverons, peut
être dans un certain temps, à proposer aux capitaux investisseurs un cadre
juridique attirant et encourageant. Il permettra aux prises de participation
dans les fonds propres d’être une ressource plus onéreuse. Il permettra, aussi,
aux investisseurs
d’accepter le risque
pour financer le plus grand nombre de projets.